Le 6 juillet 2018 le Conseil constitutionnel permettait, au nom du principe de fraternitĂ©, l’aide Ă la circulation d’un Ă©tranger en sĂ©jour irrĂ©gulier sur le territoire national. Le 11 avril dernier, il dĂ©niait au parti LR la tenue d’un rĂ©fĂ©rendum d’initiative partagĂ©e sur l’accès des Ă©trangers aux aides sociales. Enfin, le 28 mai dernier, il vient de censurer une loi du 10 juillet 1991 relative Ă l’aide juridique, car elle excluait les Ă©trangers en situation irrĂ©gulière sur notre sol. Cette fois, il s’est appuyĂ© sur les articles 6 et 16 de la DĂ©claration de 1789[1] et en a dĂ©duit « le principe de l’égalitĂ© de tous devant la justice » auquel contrevenait la loi incriminĂ©e.Â
Cette dernière décision heurte particulièrement notre droit sur deux points. Le premier est celui de la souveraineté. En s’arrogeant le droit de donner une aide sociale à des clandestins, le Conseil exerce une fonction de souveraineté. Il se « comporte en prescripteur de dépenses publiques » (Ph. Fontana). Le second point concerne le citoyen. Par la grâce du Conseil, ce citoyen n’est plus uniquement celui qui vit régulièrement sur le sol français, mais aussi celui qui, installé dans la clandestinité sur le même sol, entend jouir des mêmes droits que les premiers. Cette politique nous choque, mais nous ne savons pas où le bât blesse. C’est que, souveraineté comme citoyen, ces mots n’ont plus la même signification que dans la pensée classique.
Nous devons comprendre que, la RĂ©publique n’est pas la France. Au moment de la RĂ©volution la RĂ©publique a investi la France. Depuis, elle a besoin du corps de la France[2], de sa souverainetĂ©, pour mener Ă bien son projet rĂ©volutionnaire Ă©mancipateur. A l’heure actuelle nous voyons que la France ne cesse de se dĂ©classer. Par contre, la RĂ©publique est plus puissante, plus souveraine que jamais[3] : avortements, euthanasie, immigration, rien ne lui rĂ©siste, pour s’affranchir de l’ordre naturel. A chaque Ă©tape de cette descente aux enfers, elle endosse l’habit de la souverainetĂ©, mais elle ne vit pas la vĂ©ritable souverainetĂ© qui est ordonnĂ©e au bien commun. Sa souverainetĂ© Ă elle, s’exerce, au nom de la « religion sĂ©culière des droits de l’homme » (J.L. Harouel), sur un nouveau citoyen. Le citoyen de la DĂ©claration est l’être nouveau de la RĂ©volution, l’homme rĂ©gĂ©nĂ©rĂ©. Il doit combattre pour la RĂ©publique, son maintien, ses valeurs dont fait partie la « diversité». Nous y sommes. Le Conseil constitutionnel, en zĂ©lĂ© dĂ©fenseur de ces valeurs, veille Ă cet « engendrement » (J. de Viguerie) du nouveau citoyen. Le 28 mai dernier, le Conseil n’a pas dĂ©mĂ©ritĂ©. Il a confirmĂ© que le citoyen qui est Ă la fois l’homme d’un pays donnĂ©, mais aussi le clandestin Ă ce pays, sans attache, fait la RĂ©publique toujours plus diverse. Grâce Ă lui, cette RĂ©publique est assurĂ©e de durer. Marie-Pauline Deswarte      Â
[1]Art. 6 : la loi doit ĂŞtre la mĂŞme pour tous ; art. 16 : la garantie des droits pour tous.
[2]C’est-à -dire de son organicité.
[3]V. notre livre, La République organique en France-Un patrimoine constitutionnel à restaurer, Via Romana, 2014.
